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Des questions relatives aux possibilités d’usage des licences libres pour les membres de la Sacem – la principale société de gestion des droits d’auteur en France – ont été soulevées lors d’une formation de La Boussole à l’AIMP. Les informations disponibles à ce sujet sur Internet étant plutôt rares et parcellaires, nous allons tenter de faire le point ici.

Image extraite de la vidéo Nosotros Creamos. Nosotros Decidimos., publiée par Xnet

Depuis 2012, suite à un accord conclu entre la fondation Creative Commons et la Sacem, les membres de cette société de gestion peuvent utiliser certaines licences libres, dans un cadre restreint. Si elles ou ils le souhaitent, ces auteur·es peuvent diffuser leurs œuvres en permettant au public de les partager librement, ou même de les modifier librement, tant que les usages commerciaux restent interdits sans rémunération par le biais de la Sacem.

En d’autres termes, pour diffuser leurs œuvres, les membres de cette société de gestion peuvent utiliser les licences Creative Commons CC BY-NC, CC BY-NC-SA et CC BY-NC-ND, mais pas les CC BY, CC BY-SA ou CC BY-ND. Avant l’accord de 2012, l’usage de telles licences était tout simplement impossible pour les membres de la Sacem.

En pratique, les usages commerciaux sont par nature difficiles à délimiter. La Sacem semble avoir adopté une approche très stricte de la question et prétendre interdire à ce titre les diffusions sur des sites internet présentant des bannières publicitaires, et même certains usages en bibliothèque, à fins pédagogiques ou de recherche.

Les membres de la Sacem ont l’obligation de verser l’ensemble de leurs œuvres passées et à venir au catalogue de la société. Ces auteur·es n’ont ainsi pas la possibilité de permettre à leur public des usages commerciaux libres, par exemple en déposant volontairement une création dans le domaine public, pour aucune de leurs œuvres à venir, sauf à démissionner de la société de gestion. Pour leurs œuvres antérieures, ces auteur·es ont l’obligation de déclarer celles diffusées sous une licence permettant les usages commerciaux au moment de leur adhésion à la Sacem, sans autre incidence. De la même manière, elles et ils doivent déclarer les œuvres dont une exclusivité d’exploitation commerciale a déjà été accordée à un·e autre ayant droit. Deux points méritent ici d’être soulignés :

  • choisir de diffuser certaines de ses œuvres sous une licence libre n’empêche en rien d’adhérer à la Sacem par la suite ;
  • une adhésion à la Sacem ne modifie en rien les droits du public sur les œuvres antérieures diffusées sous une licence libre. Choisir une licence libre pour diffuser une œuvre engage juridiquement et est définitif : il est impossible à un·e auteur·e d’interdire des usages qu’elle ou il permettait auparavant de cette manière – et heureusement !

 

Mise à jour janvier 2020 : Au terme d’une longue bataille juridique menée par la Sacem et la Société pour la Perception de la Rémunération Équitable (SPRE), la plus haute juridiction de l’ordre judiciaire français a rendu un arrêt confirmant que la diffusion de musiques placées sous une licence de libre diffusion dans une surface commerciale n’est pas exonérée du paiement de redevance.

Ainsi, cette redevance – dite rémunération équitable – doit être versée aux sociétés de gestion, y compris lorsque les auteur·es des musiques utilisées refusent d’y adhérer et ne reçoivent pas de rémunération par ce biais. En pratique, les sommes collectées au nom de la diffusion de ces œuvres seront soit conservées par les sociétés de gestion, soit réparties entre des auteur·es et product·rices n’ayant pas contribué à leur création.

Cette décision juridique ­porte un rude coup au développement en France des licences Creative Commons et des autres systèmes alternatifs permettant aux auteur·es de gérer leurs droits de manière individuelle. En effet, elle confère à la Sacem et aux autres sociétés de gestion une forme de monopole pour tous les usages impliquant une transaction financière. Heureusement, cet arrêt ne concerne a priori que les œuvres diffusées sous une licence interdisant les usages commerciaux (NC), et non pas les œuvres diffusées sous une licence libre ou du domaine public.

Ces procédures juridiques illustrent la position de la Sacem concernant les systèmes permettant aux auteur·es de s’affranchir de ses services et laissent craindre que la société de gestion ne poursuive sa bataille pour étendre encore d’avantage ses prérogatives, par exemple cette fois aux œuvres diffusées sous licences libres.

Pour en savoir plus sur cette décision juridique, nous vous recommandons la lecture de ces articles :

 

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